Jardins de pierre (Gardens of Stone) - Francis Ford Coppola, 1988
En 1979, Francis Ford Coppola offrait à la Guerre du Viêt-Nam, quatre années seulement après sa fin, son apogée spectaculaire, avec Apocalypse Now : hélicoptères, remontées de rivières et napalm sur fond de « Chevauché des Valkyries ». Dix ans plus tard, les choses ont bien changé. Tout d’abord dans la carrière du réalisateur : lui qui était le maître d’Hollywood dans les années 1970 (réalisant coup sur coup Le Parrain, Conversation Secrète, Le Parrain 2 et Apocalypse Now) décide désormais de réaliser depuis sa boite de production. S’en suit donc une période des années 1980 contrastée, avec peu de succès publics et beaucoup de films désormais oubliés ou presque (Coups de cœur, Outsiders, Cotton Club, Pegguy Sue, Jardins de pierre et Tucker). Et quand, en 1988, Coppola revenait à la Guerre du Viêt-Nam, peu étaient ceux qui s’y intéressaient encore.
Il faut dire que Gardens of Stone n’est en rien l’aventure virtuose et grandiose inspirée du roman de Joseph Conrad. Peu de rapports également avec Full Metal Jacket et Platoon, sortis respectivement un et deux ans auparavant. Il s’agit même précisément de l’inverse, un peu comme si Coppola décidait de revoir son chef-d’œuvre en mode mineur. Là où Apocalypse Now, comme Platoon, était une insertion en territoire ennemi, Gardens of Stone ne quitte jamais le territoire américain (rejoignant là la première partie de Full Metal Jacket) et Fort Myer, base affectée au cimetière d’Arlington. Jackie Willow (D.B. Sweeney) est un jeune fils de sergent, tout juste arrivé, qui souhaite faire carrière dans l’armée et rejoindre le plus rapidement possible le front. Clell Hazard (James Caan), qui a connu son père à la Guerre de Corée, décide de veiller sur lui. C’est que Clell n’est pas là où il souhaiterait être, lui qui vient d’être muté dans la Old Guard, régiment porte-drapeaux prestigieux composé de vétérans, il préférerait être instructeur, donner une éducation aux jeunes recrues pour leur permettre de revenir entier de cette terrible épreuve. Mais cette reconversion lui est refusée depuis longtemps.
Du coup, il se rabattra sur un seul, ce Willow. Il sait parfaitement que cela ne sert à rien de tenter de le convaincre de ne pas faire la Guerre, mais au moins lui faire profiter de conseils, les siens et ceux de son ami Goody Nelson (James Earl Jones), pour essayer d’en revenir vivant. Ainsi passe une année, chronique paisible d’une base arrière et de ceux qui y vivent, paisible mais cela dit toujours en demi-teinte, dans les coulisses de la Guerre présente via les cercueils qui se succèdent. La vie y continue malgré tout : Clell entame une liaison avec Samantha Davis (Anjelica Huston), une voisine journaliste au Washington Post, totalement contre la guerre ; Willow effectue son apprentissage, perd son père, le fait enterrer à Arlington.
Chronique de l’arrière, mais aussi chronique amoureuse, celle d’un amour toujours repoussé à cause de l’armée, celle de Willow et Rachel (Mary Stuart Masterson), qu’il rencontre un peu plus tard dans l’année. Elle est un amour de jeunesse, que le temps et l’amour de l’armée avait fini par séparer de lui. Il la retrouve donc, au hasard, et le temps d’un rendez-vous chaotique réussit à retrouver chez elle l’amour passé. Il la convainc donc et finit par l’épouser, malgré la réticence du père de celle-ci, ancien militaire haut-gradé et un peu bougon. Mais le temps de se marier, et l’année est bien vite terminée, et déjà l’école d’officier reprend Willow à son couple. Le temps de revenir et de fêter la fin de l’école d’officier, et son nouveau grade de lieutenant, c’est le Viêt-Nam qui s’offre à lui.
Toujours en accord avec sa règle depuis le début, chronique de l’arrière, Coppola reste avec ceux qui sont restés. Quelques images du Viêt-Nam nous seront montrées, par le biais d’un reportage télévisé, images d’archives. La suite, inévitable, ne nous sera offerte qu’à partir d’une lettre, terrible, que Clell lira à table, entouré de tous les proches de Willow. On y apprendra tout ce que l’on sait déjà et que Marlon Brando résumait en une phrase définitive dans Apocalypse Now : « L’horreur a un nom et un visage ». Ici, l’horreur n’aura qu’un nom et n’aura pas de visage, celui d’une guerre qu’on a déjà trop vu (« Don’t make me say that name! », s’écrie Samantha vers la fin). Willow ne reviendra pas de cette guerre, l’époque n’est plus aux héros. Seuls, tandis que le cérémonial militaire funèbre fait son œuvre, ceux qui restent pleurent, brisés à jamais, comme Coppola qui perd son fils la même année.
Francis Ford Coppola franchement c'est un réalisateur de génie j'adore ces films surtout Dracula. Tu l'as vu ?
RépondreSupprimer